Brouillon d'un Rêve : conseils aux candidat·e·s
C’est parce qu’il n’y a que très peu de sources de financement que Brouillon d’un rêve a été créé et existe, afin de soutenir le documentaire de création. Depuis 1981, ce dispositif (dont le financement provient exclusivement de la copie privée) vise à encourager des projets d’auteurs et d'autrices aux parcours et horizons divers. Brouillon d’un rêve soutient précisément ces démarches de créateurs·trices qui ne sont pas nécessairement accueillies dans des dispositifs plus traditionnels. Nous avions invité Lise Roure, responsable de ce programme à venir en parler aux auteurs belges, voici une synthèse de son intervention.
Retrouvez dans cette synthèse des détails sur :
- l’esprit de la bourse
- le déroulement du processus
- le règlement
- composition des dossiers
- qu’est-ce qu’un bon dossier ?
- les lecteurs et le jury
NB : en raison des intervenants et des auteurs présents lors de la rencontre, il y a surtout été question de documentaire. Sauf indication contraire, ces observations restent valables pour les autres répertoires.
Pour toute question, vous pouvez vous adresser à l’équipe qui gère Brouillon d’un rêve à la Scam à Paris :
Responsable de l’aide à la création : Lise Roure +33 1 56 69 58 40.
Assistante de l’aide à la création : Fanny Viratelle : +33 1 56 69 58 06.
Mail :
Esprit de la bourse :
Ce qu’il faut envoyer au jury, c’est bien une étape de recherche, et non pas un projet abouti. Il ne s’agit pas de donner des réponses ni de faire état de dispositifs bien définis dans des dossiers trop bien ficelés, mais bien plutôt de partager des questionnements autour d’un geste documentaire, en train de se cristalliser autour d’un projet, en gardant bien à l’esprit que celui-ci est soumis non pas à des éditeurs ou producteurs, mais à des auteurs. De fait le jury valorise avant tout des écritures singulières et cherche à faire émerger des démarches novatrices, loin des formes classiques et télévisuelles. Les auteurs peuvent donc prendre des risques.
Brouillon d’un rêve accueille des désirs d’auteurs qui ne trouvent pas leur place dans des dispositifs plus traditionnels. L’idée n’est pas non plus d’exclure un type de projet, et des écritures plus classiques peuvent aussi être les bienvenues. En aucun cas cette bourse n’est un dispositif qui permettrait à d’autres guichets ou organisations de se déresponsabiliser en disant « c’est Brouillon d’un rêve qui paye ».
Déroulement du processus :
. Inscription en ligne (selon un calendrier bien précis : attention après la date à minuit il faut attendre l’année suivante)
. Lise Roure (qui coordonne ce programme à la Scam France) fait une pré-lecture afin le cas échéant de ré-aiguiller certains dossiers.
. Étude de tous les dossiers par les lecteurs qui font remonter au jury les projets qui leur semblent justes – la présélection est définie après 4 mois environ.
. Étude par le jury qui sélectionne des projets et leur attribue une bourse au montant variable, évalué de la manière la plus juste possible et en fonction du budget disponible. La sélection définitive est publiée environ 5 mois après la clôture des candidatures.
. Qu’ils soient écartés par les lecteurs ou plus tard par le jury, tous les projets sont étudiés. Les candidats dont les projets ne sont pas retenus reçoivent une note de 5 à 10 lignes de leur lecteur. Très attendus, parfois reçus de manière violente, ces avis doivent cependant être lus et relus car ils se veulent constructifs, et les lecteurs cherchent avant tout à mettre en avant ce qui leur a semblé intéressant.
En moyenne, 15% des projets déposés sont soutenus (c’est davantage qu’au CNC), par un montant maximum de 6.000 euros.
Règlement
Le détail du règlement est détaillé dans chaque appel à candidature, à lire attentivement.
Pour rappel, une seule participation est autorisée par personne et par année civile (tous projets confondus, même dans des répertoires différents). L’auteur lauréat n’est pas soumis à une obligation de terminer son projet, il n’y a pas de limite temporelle ni de somme à rembourser si le développement est plus long que prévu. Il est possible de redemander une bourse après en avoir reçu une, à la condition expresse que le projet mené grâce à l’octroi de la première bourse soit mené à bien.
Un projet aidé peut changer de forme (un film devenant une création sonore...) : à chaque projet sa vie et son trajet.
Composition du dossier :
Les pièce à joindre au dossier sont précisées dans l’appel à candidature, à lire attentivement.
Le dossier doit comporter des pièces écrites (note d’intention, synopsis, état d’avancement...), tout simplement parce que les lecteurs et le jury ont besoin de cette matière commune à tous les candidats.
Les dossiers « scolaires » ne sont pas à privilégier, chaque auteur peut s’offrir des libertés pour présenter son dossier de la manière qui semble la plus juste artistiquement. Il faut que la matière y soit, mais agencée de manière créative, personnalisée... attention toutefois à bien titrer et identifier les différents éléments du dossier pour que les lecteurs s’y repèrent.
Nombre de pages :
- audiovisuel : 15 pages (+ 15 minutes de rush)
- sonore : 5 pages
- littéraire : 20 pages dont un synopsis du projet, ses inspirations et des extraits, pour montrer la matière. Tous les genres de l’écrit (littérature, BD, poésie, essai...) sont concernés, mais la thématique doit être autour d’un geste créatif.
NB : si le dossier est juste, complet et cohérent en seulement trois pages alors cela suffit.
Il est aussi possible d’ajouter des rushes (plutôt que des séquences montées), du son, du texte...
Les questions liées à la viabilité économique ou à la faisabilité matérielle n’entrent pas en ligne de compte, sauf peut-être pour ce qui concerne les arts numériques : dans ce cas il vaut mieux avoir éprouvé le dispositif, testé l’idée sur le plan technique, qui doit rester réaliste.
Il est important aussi de motiver l’usage qui sera fait de la bourse : sans donner des chiffres détaillés ni un budget à l’euro près ou même un plan de financement, simplement pour faire état des besoins au moment de l’écriture... attendu que l’on considère que ce n’est pas à l’auteur d’assumer les frais de production.
Il convient d’expliquer au jury d’où vient l’idée qui va occuper l’auteur pendant deux ou trois ans, expliquer son histoire, son approche (attention à ne pas confondre genèse du projet et la note d’intention).
Il est aussi intéressant de replacer la proposition dans un parcours d’auteur (au-delà du simple CV), de préciser si le projet s’inscrit dans une continuité ou en rupture par rapport aux travaux, thématiques, médias explorés jusque là, et de révéler la démarche artistique de l’auteur. Cela est d’autant plus crucial dans le cas des auteurs belges dont les parcours ne sont pas nécessairement bien connus des lecteurs français.
Qu’est-ce qu’un bon dossier ?
L’enjeu est de connecter le jury à son désir de film, de poser un geste. Tout est possible, tout est envisageable et il n’existe pas de norme ; il faut viser la justesse par rapport à son sujet. Il n’existe pas de dossier modèle, mais il reste intéressant de découvrir des dossiers lauréats, et de se confronter à d’autres démarches d’auteurs. Pour cela, plusieurs possibilités :
- sur le site de la Scam.fr, on peut consulter la liste des lauréats et les résumés des projets précédemment aidés
- le site du CNC propose une « scénariothèque » consacrée au documentaire
- à la Maison des Auteurs de Paris il est possible de lire des dossiers boursiers et de voir les films qui en ont résulté
- sur la plateforme Tënk, une plage spéciale Brouillon d’un Rêve permet de visionner des films soutenus par le dispositif, et de lire les dossiers correspondant.
C’est dans le trajet entre le dossier et le résultat qu’on apprend, il est donc très intéressant de voir l’espace et les directions qu’ont pris les germes plantés dans les dossiers.
On sait que souvent les auteurs se sentent obligés de présenter des dossiers très léchés, mais l’inverse à Brouillon d’un rêve, il faut se lancer ! Mieux vaut poser les bonnes questions que donner les bonnes réponses. D’ailleurs pour la création sonore, qui reste une discipline de l’oralité, on constate qu’il n’y a pas cette culture du dossier, voire qu’on se méfie des dossiers trop peaufinés ou des écritures trop normées. À bon entendeur...
Certaines thématiques sont récurrentes dans les dossiers soumis, comme dans l’air du temps (les migrants, la transmission...). Ne pas hésiter à consulter les dossiers précédemment aidés, ce qui permet de ne pas faire un énième film sur tel ou tel sujet... d’autant plus que rien que pour le documentaire, le jury reçoit près de 700 projets au cours des 6 sessions annuelles. Il faut se distinguer, se démarquer, mettre en évidence l’urgence, la nécessité de son projet en particulier. Le sujet d’ailleurs ne suffit pas, il faut aussi pouvoir mettre en évidence l’expression d’une pensée singulière, d’un geste artistique.
Lecteurs et Jury :
Des membres extérieurs sont invités, ainsi que des auteurs d’autres répertoires que celui à l’étude, dans une volonté de confrontation des cultures et d’ouverture.
Ce ne sont pas des producteurs, des diffuseurs, des éditeurs ni des financeurs mais bien des auteurs qui reçoivent les dossiers. Il s’agit donc de les sensibiliser par une démarche, une façon d’accrocher le réel. Ils liront attentivement chacun des dossiers reçus, et motiveront leur choix, quel qu’il soit.
Paroles d’ancien lecteur : « lecteurs et jurys sont ouverts et bienveillants, ils ne demandent qu’à être étonnés ! ».