Recours de Netflix devant la Cour constitutionnelle
Recours de Netflix contre un décret – loi de transposition de la Directive SMA devant la Cour constitutionnelle de Belgique
En 2023, la Fédération Wallonie-Bruxelles votait un décret transposant la directive relative aux services de médias audiovisuels (SMA) afin de faire en sorte que les éditeurs locaux et étrangers contribuent plus fortement à la production audiovisuelle de la FWB, en vue de soutenir la production indépendante. Aujourd’hui, Netflix conteste cette mesure, invoquant des violations de la Constitution belge et du droit européen.
17 septembre 2024
En 2018, l’UE a voté la directive relative aux services de médias audiovisuels qui prévoit notamment des contributions financières que doivent verser des fournisseurs de services de média audiovisuel, les plateformes, pour soutenir la production indépendante de films et d’œuvres audiovisuelles.
Dans cette organisation politique complexe qu’est la Belgique, la Communauté flamande et la Communauté française de Belgique (Fédération Wallonie-Bruxelles) disposent des compétences en matière audiovisuelle et culturelle et organisent notamment le soutien à la production indépendante d’œuvres audiovisuelles et de films.
En décembre 2023, la FWB a voté un décret transposant cette directive qui prévoit une revalorisation des contributions des éditeurs de services linéaires et non linéaires pour soutenir la création audiovisuelle et sa production indépendante. Les pourcentages de contribution, dont une partie doit être affectée selon des critères culturels, sont calculés sur le chiffre d’affaires des éditeurs de services de médias linéaires et non linéaires. Ils sont progressifs en fonction du chiffre d’affaires annuel, et dans le temps avec une montée en charge entre 2023 et 2027, afin de permettre au secteur de convenir de projets nouveaux. Les pourcentages sont nettement inférieurs à ceux appliqués dans le cadre de la transposition en droit français.
Netflix a introduit dans les délais légaux un recours en annulation de ce décret devant la Cour constitutionnelle belge.
Cette société invoque comme motifs d’annulation des dispositions de la constitution belge fondée sur le principe d’absence de discrimination et de proportionnalité entre citoyens ainsi que la violation de plusieurs dispositions de droit européen (traité de l’Union, directive sur les services électronique, directive SMA) dont le caractère illégal du financement, la violation du principe de libre prestations de services…
Force est de constater que ce recours attaque en réalité le système de financement de l’audiovisuel mis en place tant par la directive européenne sur base de contributions d’éditeurs, que par les états membres ayant un système de financement de l’audiovisuel. Ce recours, s’il devait être jugé fondé par la Cour constitutionnelle ou par la Cour de justice de l’Union européenne, menace tant le développement d'une production indépendante européenne que les politiques de diversité culturelle de l’audiovisuel.
Or, un récent rapport de l’Observatoire européen de l’audiovisuel indique clairement que 35% des investissements dans l’audiovisuel sont investis au Royaume Uni et 18% en Espagne. En Belgique, ce pourcentage est ramené à 2%.
Rappelons que Netflix est établi aux Pays-bas et opère à partir de ce pays. Cet opérateur ne dispose d’aucun ancrage belge, à l’exception de personnels en charge des relations institutionnels auprès de l’UE et ne paye aucun impôt direct en Belgique.
Nous vous tiendrons informé·es des avancées de ce dossier. Toutefois, aucune décision de la Cour Constitutionnelle ne devrait nous parvenir avant un an et demi. En attendant, la Scam continue sa mission de protection et de défense de vos droits.
Pour aller plus loin
. Lire l'article Netflix attaque le décret SMA de la Fédération Wallonie-Bruxelles paru dans l'Echo le 28.08.24
. Lire le projet de Décret SMA du 14.11.23
. Lire notre éclairage historique qui retrace le temps long dans lequel s'inscrit ce recours